Ramsay aurait-il lu son discours à Lunéville ?

Cette hypothèse séduisante que certains historiens avancent est insuffisamment étayée car elle s’appuie davantage sur des suppositions que sur un document authentique.  Le premier Discours, conservé à Épernay, et daté de 1736, a été écrit pour être prononcé devant une « loge de Saint-Jean » dont on ignore l'Orient. Chevallier comme Mollier pensent que ce Discours est lu à Paris, à Saint-Thomas n°1 ; peut-être s’agit-il, vu la date, d’une Assemblée de la Saint Jean des Loges parisiennes. On devine à la teneur de ses propos, qu’il est prononcé devant un public aristocratique choisi, composé d’une forte majorité d’Anglo-Saxons, ou tout du moins d’inspiration jacobite. La seconde version Discours aurait été prévue pour être prononcée devant une « Grande Loge », c'est-à-dire l'assemblée générale de l'Ordre, composée de francs-maçons gallicans et hanovriens, devant se tenir à Paris le 24 mars 1737, ce qui aurait été empêché suite à l'interdiction de Fleury. Devant ce refus, on peut légitimement supposer qu’il a essayé de trouver une voie de sortie. Or, la loge de Lunéville, on le sait, vit la maçonnerie en toute tranquillité et on peut imaginer que des maçons aient réussi à convaincre Ramsay d’aller lire la nouvelle version de son Discours dans le duché du roi Stanislas. Il est donc parfaitament possible que Ramsay lise son discours à Lunéville, d’autant plus que divers témoignages retrouvés par Pierre Mollier montrent que Ramsay n’est pas entré dans l’ombre après le veto de Fleury (1).

1 Source : voir l’Almanach des cocus, ou amusemens pour le beau sexe par un philosophe garçon (Constantinople, Imprimerie du Grand Seigneur, 1741) où il est écrit que le discours de Ramsay aurait été donné à l’occasion d’une initiation alors qu’il était « grand orateur de l’Ordre ». L’abbé Barbier pense que ce discours a pu être tenu à Lunéville en 1736, 1737 ou 1738 (BARBIER Emmanuel, Les infiltrations maçonniques dans l’église, Lille, Desclée, 1910). L’hypothèse d’un discours prononcé devant la cour de Lunéville est reprise par de nombreux auteurs, ainsi que sur Internet. CORSETTI Jean-Paul, Storia dell’esoterismo e delle scienze occulte, Roma, Gremese editore, 2003, p.270 ; LE FORESTIER, La Franc-maçonnerie templière et occultiste aux XVIIIe et XIXe siècles, Paris, Aubier Montaigne, 1970.