4, rue de Savoie

La soupente est exiguë… et c’est le moins qu’on puisse dire : quatre mètres sur quatre. Comme mobilier, Luc dispose en tout et pour tout d’un lit-cage, d’une petite table avec chaise et d’une armoire plastifiée à armature métallique. La piaule récupère tant bien que mal un peu de lumière au travers d’un vasistas, la plupart du temps maculé de fiente de pigeons, et, quand en journée le ciel est trop couvert, il doit allumer sa lampe à pétrole pour étudier ses polycopiés. L’hiver, il se chauffe avec un poêle à alcool.

Question subsistance : il possède un garde-manger et dispose d’un camping-gaz pour préparer son café du matin et cuire ses repas du soir.

Pour les commodités, il va dans un réduit qui débouche dans les escaliers de l’immeuble, à l’étage du dessous, où il doit se satisfaire de chiottes à la turque et d’un robinet d’eau froide, situé à cinquante centimètres d’un sol carrelé. C’est dans cet endroit minable qu’il fait sa toilette et qu’il lave sa vaisselle. Ce n’est pas le Pérou ! Mais il faut dire que c’est de sa faute et… bien de sa faute !

Car il est conscient du risque inouï que ses parents ont pris en le laissant vivre tout seul à Paris, armé seulement de l’enthousiasme de ses dix-huit ans, mais fragilisé par un manque de diplôme, puisqu’il a tout raté à l’école.

Il ne lui reste plus que l’aléatoire enseignement par correspondance de l’École Universelle et des cours du soir de la place Clichy. Sûr qu’il n’est pas le genre de candidat sur lequel on miserait pour un bel avenir social… et que ses parents envisageaient pour lui. Il a bien conscience que ses lendemains ne chantent pas… !

Editions maçonniques, Montélimart, 2019